07 février 2011

Flash Infos Compte Rendu de Mandat - Conseil de Paris des 7 et 8 février - Intervention sur les seniors suite à la communication du Maire de Paris


Monsieur le Maire, mes cher-e-s Collègues,

« Le drame de la vieillesse, ce n'est pas qu'on se fait vieux, c'est qu'on reste jeune. » Finalement, Oscar Wilde n’a sans doute pas tort. Chaque élu ici présent sait bien l’engagement que peuvent revêtir les seniors dans nos arrondissements afin de contribuer à la cohésion de notre capitale. Bien loin uniquement des associations de sauvegarde des vieilles pierres ou des organisations de pétitions, nombre d’associations de soutiens scolaires, de parrainages professionnels ou encore de lutte contre l’isolement sont le fruit de jeunes retraités qui estiment, à juste titre, avoir encore un rôle à jouer dans la cité.

Depuis qu’une délégation au lien intergénérationnel a été créée à Paris, ce nouveau domaine se théorise. Il s’éloigne de plus en plus de la volonté de faire se rencontrer les très vieux et les très jeunes et il prend un autre aspect que les activités ouvertes à tous et surtout aux seniors. Liliane Capelle, votre adjointe en charge de ce secteur, le rappelle dès qu’elle le peut. L’intergénérationnel, c’est créer de nouvelles formes de solidarités qui ne se limite pas qu’au versement ou à des ponctions financières, mais c’est surtout créer des occasions de rencontre et d’échange, des seniors vers les moins seniors et vice versa.

Mais pour cela, il faut permettre à nos seniors de rester vivre dans la capitale comme nous avons su le faire pour les familles et de plus en plus pour les classes moyennes. Car si bien sûr certains de nos seniors aspirent à ces activités, d’autres aspirent tout simplement à vivre en pouvant faire les gestes de la vie quotidienne, sans avoir à dépendre ou à devoir s’éloigner de sa famille ou de ses amis. Et maintenir cette présence des seniors dans notre capitale passe en premier lieu par une politique du logement et de l’habitat adaptée à cet enjeu.



Le premier besoin des seniors réside dans celui de se maintenir à leur domicile tant qu’ils le peuvent. Devoir déménager suite à un congé, à un loyer qui devient trop cher ou des étages qui deviennent trop pénibles est vécu de manière excessivement frustrante. Or, cette situation devient de plus en plus fréquente.

En effet, il suffit de se référer au dernier recensement pour se rendre compte qu’il y a dans la situation locative des seniors un problème social à régler. Certes, ils sont plus souvent propriétaires que les actifs, mais les cas d’indécences du logement touchent beaucoup plus souvent les seniors et un tiers d’entre eux vivent dans des immeubles inaccessibles.

De même, une nouvelle réalité sociologique apparaît, ce sont les retraités pauvres, suivant en toute logique celle des travailleurs pauvres. Essentiellement entre 60 et 74 ans, ces jeunes retraités se voient d’une part confrontés à des problèmes de paiement de leur loyer et d’autre part à une impossibilité de chercher un autre logement vu les conditions de plus en plus drastiques d’accès au marché privé locatif.

Tel est le bien fondé de la création de l’extension de l’allocation Paris Logement qui permettra aux seniors qui vivent avec moins de 1100 euros ou 1600 euros en couple de recevoir 80 à 110 euros afin de les solvabiliser dans leur logement. 7 700 seniors seraient amenés à pouvoir en bénéficier. Espérons aussi, Monsieur le Maire, que le gouvernement saura entendre votre demande de mise en place d’une expérimentation d’encadrement des loyers à relocation car le pendant nécessaire de la solvabilisation des locataires est bien sûr le renforcement des possibilités d’accès au logement.

C’est d’ailleurs plus du double, 16 000 seniors, qui sont demandeurs d’un logement social, toute catégorie de plafond confondus. Ce différentiel entre seniors éligibles à Paris Logement et le nombre de demandeurs de logements sociaux de plus de 60 ans laisse fortement entendre qu’il y a aussi d’autres problématiques dans le dossier des seniors et de leur habitat que le loyer. Bien entendu, j’entends par là les situations de congés délivrés à ces jeunes retraités pas encore protégés par la loi les rendant plus difficiles après 70 ans ou encore les situations des seniors vivant en étage avec des situations physiques ne leur permettant plus de se mouvoir aussi facilement qu’avant. Le prochain bilan que nous allons tirer de bientôt un an de mise en place d’une commission d’attribution des places en résidences appartements et résidences services du Centre d’Action Sociale de la Ville de Paris sera riche en enseignement sur l’augmentation du nombre de seniors hébergés chez ou par leurs enfants ou titulaires d’une chambre à l’hôtel, n’ayant pu trouver un propriétaire acceptant de leur louer un logement.

Face à cela, la Ville de Paris ne reste pas inactive. Bien évidemment, notre engagement à produire 40 000 logements sociaux d’ici 2014 doit aussi bénéficier aux seniors. De même ; les bailleurs sociaux doivent tout faire pour rendre accessible aux situations de mobilité réduite leur parc et dépasser largement le taux actuel de 20%. Citons aussi le parc privé qui peut bénéficier du Programme d’Intérêt Général Personne à Mobilité Réduite, du diagnostic Habitat du Pact de Paris, de l’aide à l’amélioration de l’habitat,…

Tout comme l’expérimentation du Réseau Logement Seniors dans le 3e arrondissement dans le parc social, à terme, il faudrait que devienne envisageable, en plus de cette mise en accessibilité, une coordination de services sociaux spécialisés et une offre de petits entretiens via les régies de quartier, pris en charge en partie par la Ville, pour tous ces petits travaux qui enquiquinent la vie quand on ne peut plus les faire. Sans accessibilité, sans service et sans entretien, le logement devient très vite une prison. Ce dispositif aurait ainsi pour objectif d’adapter et de pallier le plus tôt possible à la dépendance et à la solitude des seniors dans leur logement tout en rendant agréable le maintien à domicile.

Mais il nous faut aussi offrir des lieux de vie plus communautaires qui permettent de briser cette solitude subie par de plus en plus de seniors. Telle est notre volonté en finançant grandement l’entretien et les réhabilitations en résidences appartements ou en résidences services, toutes équipés d’un club ou d’un restaurant et d’un service de soins infirmiers à domicile. Cette politique d’entretien active menée par le CASVP est particulièrement importante car elle déstigmatise grandement ces structures en brisant l’image des mouroirs des maisons de retraite indécentes. De même, on voit fleurir ici ou là des activités proposées qui sortent des traditionnels repas accordéons ou des ateliers lecture. Les consoles Wii ont fait leur entrée dans les résidences et de plus en plus d’activités originales comme des initiations à l’art moderne ont fait leur entrée dans les clubs de nos seniors !

Et puis, il y a des moments qui ne sont pas faciles à vivre, que l’on craint tous ou que l’on a déjà vécu. Cette perte d’autonomie définitive qui laisse peu à peu la place à la dépendance et à la grande dépendance. Ce sont les débuts d’un Alzheimer, les troubles sensoriels, les difficultés de plus en plus dures à se mouvoir. Et puis, tout cela, qui irrésistiblement s’installent et font que la vie seule n’est plus envisageable, ni pour le senior, ni pour ses accompagnants.

Et c’est là que la Ville a deux responsabilités aussi énormes qu’elles touchent éminemment à l’humain. Tout d’abord, celle de protéger les plus précaires ou les plus isolés de celles et ceux qui voient en eux un nouveau marché et celle de rendre digne l’approche de la fin de la vie.

Je crois avec humilité, Monsieur le Maire, mes cher-e-s Collègues, qu’en nous investissant autant dans le financement de places en Etablissement Hébergeant des Personnes Agées Dépendantes, nous permettons grâce au Centre d’Action Sociale de la Ville de Paris, établissement à capital 100% public, de ne pas laisser l’intégralité de la prise en charge de la grande dépendance au secteur privé, tant que celui-ci ne sera pas mieux régulé. C’est ainsi que tous nos établissements sont habilités intégralement à l’aide sociale et peuvent accueillir également les parisiennes et les parisiens les plus précaires.

Enfin, notre volonté de financer 2 200 places dans ces fameux EHPAD trouve son application à la fois dans la construction de nouvelles places mais également dans l’humanisation de certains des 14 établissements que la Ville gère. C’est ainsi ce que les experts appellent la bienveillance architecturale qui est à l’œuvre dans chacun de nos chantiers. En effet, les chambres dans ces EHPAD sont bien souvent les derniers lieux de vie de ces seniors. Autant pour leurs proches que pour eux, finir ses jours dans des conditions de vie dignes est la moindre des choses qu’une Ville comme Paris peut offrir à ses aînés.

Monsieur le Maire, mes cher-e-s Collègues, l’actualité va bientôt être au traitement que le gouvernement va réserver au cinquième risque, celui qu’il appelle « la dépendance ». Des échos de recours constant au secteur privé assurantiel nous sont à tous arrivés aux oreilles, créant des craintes chez certains d’entre nous. Attendons ce débat mais soyons sûr que la question des seniors ne se limite pas qu’à la dépendance mais beaucoup plus au maintien de l’autonomie et à leur dignité. Et si Paris ambitionne d’être modèle en ce domaine, alors il aura des choses à dire dans ce débat…

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