06 décembre 2011

Mais qui a repeint la fontaine Wallace du passage du Pont aux Biches... en blanc?


Les habitants du nord du 3e, les plus proches du passage du Pont aux Biches, ont eu la surprise en se réveillant de voir leur fontaine Wallace, d'un vert très parisien, transformée à la mode de Saint Sébastien en Espagne et recouvert d'un blanc immaculé?

Services de la Ville en action? Hurluberlus en quête de créativité?

En attendant, l'occasion se présente de faire un point sur l'histoire de ces fontaines...

Les fontaines Wallace sont des points d'eau potable publics qui se présentent sous la forme de petits édicules en fonte présents dans plusieurs v

illes dans le monde. C'est à Paris qu'ell

es furent implantées en premier et qu'on en trouve le plus grand nombre. Dessinée par Charles-Auguste Lebourg, elles tiennent leur nom du phil

anthrope britannique Richard Wallace qui finança leur édification. Elles sont reconnues dans le monde entier comme un des symboles de Paris.

Pendant la guerre de 1870 déclarée par Napoléon III contre la Prusse, Paris connaît des temps très durs. Le rétablissement de la République, l'épisode de la Commune de Paris, les bombardements destructeurs des Prussiens, la défaite cuisante qui laisse l'Alsace-Lorraine à ces derniers, sont autant de bouleversements qui nuisent à la ville.

La reconstruction de la capitale est très rapide, malgré les ravages. En moins de dix ans, elle est transformée : nouveaux bâtiments (Sacré-Cœur),

nouveaux boulevards (Raspail, Saint-Germain). La mode est à la philanthropie : les bourgeois fortunés financent de nombreuses « bonnes œuvres » (Croix-Rouge, Armée du salut, Société philanthropique) afin d'entretenir leur réputation.

Parmi ces philanthropes, Sir Richard Wallace est l'un des plus éclectiques et des plus discrets.

Ayant hérité de son père une grande fortune en août 1870, il décide d'en faire profiter les Parisiens, ce qui lui va

ut une grande popularité. On peut le considérer comme un philanthrope, au sens propre du terme, par opposition à certains membres de la

bonne société, pour qui les actions de charité ne sont qu'un moyen d'accroître leur notoriété. Son dévouement le pousse à rester dans sa villa parisienne assiégée pour pouvoir être là où on avait besoin de lui, plutôt que de se réfugier dans une de ses luxueuses propriétés.

Il fonde également un hôpital, s'occupe de l'accueil des victimes des bombardements et de la distribution de vivres à la population. Il reste toujours fidèle à sa nation d'adoption, la France, où il repose désormais, au cimetière du Père-Lachaise.

Les fontaines portant son nom comptent parmi s

es nombreuses contributions au patrimoine parisien.

Suite au siège de Paris et à la Commune, de nombreux aqueducs sont détruits, et le prix de l'eau, déjà élevé, en est considérablement augmenté. De nombreux démunis se trouvent dans l'impossibilité d'en trouver gratuitement.

Dès lors, la tentation des « marchands de vin » est grande chez les indigents, et c'est un devoir moral que de les aider et de leur permettre de ne pas plonger dans l'ivrognerie. Le besoin urgent de ces « brasseries des quatre femmes » est clairement prouvé par la vitesse à laquelle le projet est concrétisé. Encore aujourd'hui, où l'eau et l'hygiène ne sont pas un problème pour la grande majorité des Parisiens, ces fontaines sont souven

t les seuls points d'eau gratuits pour des personnes comme les SDF. Riches ou pauvres, tous les passants peuvent s'y désaltérer.

La philosophie de Wallace est d'aider efficacement et discrètement ceux qui en ont besoin : les fontaines sont la manière d'y parvenir tout en réalisant son souhait d'embellir Paris, sans faire dans le spectaculaire.

Comme quoi, on passe à côté, sans s’en rendre compte, mais c’est une partie de l’histoire de Paris ! (Et en blanc, c’est pas si mal…)


Nota Bene du 28/02: et voici comment elle est devenue aujourd'hui :)



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