16 mai 2008
Les raisons d'un premier post
Et bien, voilà. Moi aussi, je me mets à la blogosphère...
Ce projet me parcourait la tête depuis bien longtemps mais,bon, on remet toujours au week-end prochain pour commencer à cliquer. Mais là, il y a eu un élément déclencheur, une journée qui m'a donné envie d'écrire ma petite vie d'élu local, de militant, de responsable politique, de citoyen...
Cet élément, c'est l'expulsion du squat orchestré par Jeudi Noir dans un bâtiment de plus de 4000 m² laissé vide depuis plus de 5 ans en plein centre de Paris, alors même qu'il n'y a pas besoin de s'étendre sur la crise du logement. Un peu d'histoire...
11 mars, fraichement élu de la veille, on nous apprend à la Mairie du 3ème l'ouverture de ce nouveau squat dans cet immeuble situé sur une parcelle composée du 80, rue de Turenne et du 7, impasse Saint Claude. Panique générale à l'adresse visée car, il y a 5 ans de cela, un autre squat a laissé de très très mauvais souvenir. Moi, je suis plutôt hilare à l'idée de retrouver Julien, de Jeudi Noir, car je l'avais déjà croisé plus d'une fois quand j'étais chef de cabinet de Jean-Yves Mano, en particulier au moment de l'occupation de la fameuse "rue de la Banque", qui notons-le a permis de financer là-bas une vingtaine de logements sociaux...
On en parle entre nous, on évoque les nuisances possibles, on essaie de se mettre à la place des locataires et puis je propose de faire un voeu pour le soumettre au Conseil du 3ème ardt et après au Conseil de Paris. L'idée est d'apporter notre soutien et de demander à la Ville d'acquérir ce bien si cela est possible. A mon étonnement, quelques levées de boucliers, quelques hésitations,... J'explique que nous ne sommes pas le Préfet, que nous ne sommes pas là, nous élu-e-s, pour faire respecter la loi mais pour la faire évoluer, que nous pouvons faire confiance à ces deux associations,... Le voeu passe enfin et sera même par la suite voté en Conseil de Paris.
C'est alors le moment d'assumer... Les jours passent, les contacts sont pris avec les propriétaires via un administrateur judiciaire, l'affaire est compliquée,... Nous devons aussi recevoir les riverains qui veulent que nous demandions l'expulsion de ce lieu pour des raisons de sécurité. Franchement, ce moment est mon pire premier souvenir souvenir d'élu. Des gens qui sous couvert de sécurité vous disent que, chaque soir, ils n'espèrent qu'une seule chose: qu'il y ait du bruit pour appeler les flics, que franchement le bruit des déménagements, c'est insupportable (tu connais la campagne?), qu'ils ont vu des choses dedans alors qu'avant ils assurent n'a avoir jamais mis les pieds,... Comment dire? Je comprends les traumas mais je refuse de les suivre. M'en fous. Le samedi qui suit, j'irai sur place pour voir un peu l'exposition organisée par La Deuxième Aile.
Les jours passent, les contacts continuent et là... mercredi matin... 7H30... Ding Dong... je me lève bredouille, enfile un peignoir qui traine là, ouvre la porte et je suis confronté à Denis et Flora, deux collègues élu-e-s, venus me secouer pour m'avertir de l'expulsion... Je réalise pas tout de suite car pas bien réveillé mais rapidement douchepantalonpommetaxizorroestarrivé.
Et là, ça commence fort, ils ont tout viré sans même nous avertir, sans rien nous dire, même la veille à 22H, ils ont fouttu à la rue tous ces jeunes dans une violence un peu inhabituelle. Je fonce pour rejoindre le cortège qui essaie de résister. Un beau brun CRS m'empêche de passer. Je grommèle puis profitant de son dos tourné, zou je passe et je m'installe dans le rang, ma camarade élue Camille, bras dessus dessous... On freine de tout nos pieds mais on peut pas grand chose face à des mecs nourris à la viande fraiche le plus clair du temps et affamés volontairement la veille de l'expulsion.
Tout ça, ça dure quand même toute la matinée! Et l'après-midi, c'est pas mieux... Jeudi Noir décide d'envahir l'Eglise Saint Denys du Saint Sacrement. Chouette. Moi qui aime tant les curés. Ambiance bon enfant évidement. Je rentre un peu dans l'église pour avoir de la fraicheur, pas cons, ces curtons. Et là, v'la ti pas que je vois celui qui lit l'Evangile et qui prêche l'Amour signer de sa blanche main la demande d'expulsion sans même avoir pris la peine de venir discuter avec nous! Amen...
Ca s'organise alors, ca s'asseoit devant les portes, je retrouve Camille, je suis accroché à une jambe de Pierre, son mari mais les CRS auront tôt fait de nous soulever.
J'en ai vu pas mal des expulsions, mais là, elle m'a étonné par sa violence. Des cous et des bras maîtrisés, des gens malmenés,... moi j'ai failli être littéralement jeté par terre... ce qui m'a valu un slogan pour moi tout seul repris par les gens sur place ("Respectez nos élu-e-s!!")...
Et puis, on a repris notre quotidien, notre route...
Et là, j'ai eu peur.
J'ai eu peur de voir que l'on peut sans aucun soucis demander le concours de la force publique sans même chercher à discuter... Merci Monsieur le Curé.
J'ai eu peur d'entendre des gens faire preuve d'un tel cynisme face à la cruelle crise du logement... Merci les habitants du 80.
J'ai eu peur de me dire que ne pas nous avertir de l'expulsion signifiait que de plus en plus l'ordre public devenait sécuritaire et violent... Merci Monsieur le Préfet et Monsieur Sarkozy.
Mais j'ai était content de voir le regard des passants, la venue des copains, les textos de soutien,... Merci d'ailleurs.
Voici l'évènement, voici beaucoup trop de lignes pour dire une crainte, voici les raisons de ce premier post.
www.jeudi-noir.org
Photo Luc Mandret http://777socrate.blogspot.com/
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5 commentaires:
Article très intéressant monsieur le conseiller de Paris
Bien vu, bien écrit.
Bienvenue dans la blogosphère, cher ami.
F.
bien
Sympa! Tous mes encouragements à poursuivre dans cette voie!
Olivier
Bonjour,
bravo pour ton action a l'eglise mercredi dernier. Un ami photographe etait enfermé avec vous (les photos son bien au passage et celles de toi en particulier) et m'a tout raconté. Que sont devenus les expulsés ?
Bye bye
Jerome
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